La problématique des taxis à Paris est un serpent de mer qui revient à chaque campagne électorale ... parce que personne n'ose l'affronter de face et rechercher des solutions de fond et crédibles.
Ces dernières années ont vu l'émergence des VTC et le gouvernement et la Mairie de Paris n'ont rien trouvé de mieux que d'envenimer les rapports entre les 2 professions concurrentes. En effet, alors que les VTC mettent en moyenne 7 minutes pour prendre en charge un client, une loi est entrée en vigueur le 1er janvier 2014 pour leur imposer de mettre 15 minutes minimum entre l'appel du client et sa prise en charge, ce qui veut dire que l'on impose aux VTC de faire mal leur travail! Certains réclament même de leur imposer un délai de 30 minutes et un prix minimum de 60€ la course! Et comme les VTC sont abondamment utilisés par les plus riches touristes et les hommes d'affaire, le gouvernement a accepté un amendement qui autorise de déroger à cette loi pour les clients sortants d'un 4 ou 5 étoiles ou sortant d'un congrès professionnel! On instaure ainsi 2 catégories de clients. C'est particulièrement original sur le plan juridique et très surprenant venant d'un gouvernement de gauche!
Pour faire face au manque chronique de taxis à certaines périodes de la semaine comme le vendredi soir ou le samedi soir, certains politiques proposent d'augmenter le nombre de licences ou d'offrir une licence gratuite à chaque propriétaire d'une licence. Ce sont de fausses bonnes idées car c'est ignorer la réalité des difficultés de la majorité des chauffeurs de taxis qui n'ont déjà pas assez de clients aujourd'hui et dont beaucoup mènent une vie de bagnard.
Et pourtant, toutes les études montrent que le taxi est sous utilisé à Paris comparé aux grandes capitales européennes et donc que le potentiel de développement est énorme pour la profession si les prix pouvaient baisser significativement.
En fait les chauffeurs de taxis sont victime du "piège de la licence" qui génère un prix trop élevé de la course et oblige les jeunes à trimer pendant des années avec des revenus faibles pour pouvoir se la payer. Mais ceux qui l'ont enfin payée ne veulent absolument pas qu'elle soit remis en question car ils comptent bien la vendre (autour de 200 à 250 000€ à Paris) pour pouvoir payer leur retraite. Cela donne une image dégradée de la profession auprès des politiques notamment qui ne voient chez les chauffeurs de taxis qu'un corporatisme archaïque accroché à la défense de sa licence.
Alors, par facilité et par manque de réflexion approfondie, les politiques cèdent à leurs illégitimes revendications de mettre des bâtons dans les roues de leurs concurrents honnis les VTC pour apaiser leurs légitimes accès de colère. Voilà comment on en arrive à voter des lois stupides.
La vraie solution pour sortir de ce piège passe par 2 mesures importantes:
Premièrement il faut assouplir l'horodateur. Actuellement à Paris, la vacation d'un chauffeur de taxi contrôlée par son horodateur est de 11 heures avec 2 pauses d'une demi-heure minimum chacunes et de trois heures cumulées. Si on assouplit l'horodateur en autorisant dans une vacation de 11 heures la liberté du nombre et de la durée des pauses, on permet aux chauffeurs de taxis de travailler sur les plages horaires où ils estiment avoir des clients. Cela leur évite de perdre 30% de leur temps à attendre le client et donc leur fait gagner en pouvoir d'achat et cela leur fait également gagner en confort de vie en leur permettant par exemple d'aller chercher leurs enfants à l'école. En échange de cet assouplissement, le chauffeur s'engagerait à faire soit la vacation du vendredi 20 heures au samedi 5 heures ou celle du samedi 20 heures au dimanche 5 heures.
Deuxièmement il faut créer un mécanisme pour sortir du piège de la licence. Actuellement la majorité des chauffeurs de taxis sont des artisans taxis qui ont payé cher leur licence ou sont encore en train de la payer. Un nombre significatif sont locataires et doivent s'acquitter d'un loyer exorbitant de 800 à 900€ par semaine, sans compter le prix du carburant qui reste à leurs charges. Le mécanisme consisterait en un plan de rachat à un prix bloqué à 200 000€ de chaque licence d'un chauffeur partant à la retraite (environ 700 par an sur les 19 000 chauffeurs) où 50 000€ seraient payés par un jeune à qui serait transmis la licence qui deviendrait cependant invendable. La licence ne serait plus un moyen de préparer sa retraite pour le jeune chauffeur mais elle lui serait concédée pour un prix bradé ne l'obligeant plus à en répercuter exagérément le coût sur la course. Les 150 000€ restants seraient financés à hauteur de 50 000€ (soit 35 Millions d'€ par an) par la Mairie de Paris et pour 100 000€ par une taxe sur les VTC (soit 70 Millions d'€ par an). Mais en échange de payer cette taxe, le VTC n'aurait plus qu'un délai de 5 minutes à respecter entre l'appel du client et sa prise en charge et aucun prix minimum de course ne lui serait imposé. Ainsi tout le monde y gagnerait. Le taxi avec plus de revenus, de confort de vie et un nombre plus élevé de courses grâce à la baisse du prix de la course et une optimisation de son temps de travail, le VTC avec plus de clients et moins de règles à respecter et la collectivité avec plus de taxis et de VTC en circulation, notamment dans les plages horaires où ils manquent actuellement. L'Etat y gagnerait également en profitant de la meilleure santé financière de chaque acteur de ce secteur et du développement des 2 professions.
Ainsi, en 20 ans la situation serait définitivement assainie. Durant cette période, les seules règles qui resteraient dans cette politique d'essence à la fois libérale et humaniste seraient le numérus clausus pour les taxis et l'interdiction pour les VTC d'être "hélés" par le client, c'est-à-dire que le VTC ne peut prendre en charge le client sans réservation. Cependant, une fois les dernières licences à 200 000€ liquidées, ces règles aussi devraient être supprimées avec une libéralisation totale du secteur. De toutes les façons, il n'y a pas d'autres alternatives. Le développement des technologies numériques rendra de plus en plus relatif et incontrôlable le respect du délai entre la réservation et la prise en charge, et le développement des VTC avec le maintien du numérus clausus empêcherait les taxis de profiter de l'extension du marché que la baisse du prix de la course permettrait.
Ne pas prendre ces 2 mesures salutaires (ou d'autres si quelqu'un peut en proposer des plus pertinentes) conduirait la profession de chauffeur de taxis dans le mur. Les lois européennes ou tout simplement le développement de la fraude rendront impossible de continuer avec des prix aussi élevés à faire face à la concurrence. Et les licences à 250 000€ finiront par être invendables!
Je livre ces propositions au débat public pour les élections municipales de mars 2014. Quoiqu'il en soit, les chauffeurs de taxis, les VTC et les parisiens ont le droit à un vrai débat de fond sur ce sujet si important pour leur avenir et pour Paris.
Philippe Dervaux,
Animateur de l'UDI Paris 11
Re: Ma réponse à Philippe Dervaux (sur http://www.lestaxis.fr/viewtopic.php?f=47&t=2276)
Monsieur, |
Ma réponse à Handi Taxi,
Après consultation de votre réponse et réflexion sur l'actualité récente, j'ai légèrement infléchi mes propositions.
D'abord je me réjouis de l'accord trouvé avec le gouvernement pour geler les immatriculations de VTC. Néanmoins cette mesure répond à une urgence mais n'est pas une réponse de fond au problème.
Je propose 5 réponses de fond au problème:
- La suppression de l'horodateur.
- Un plan de "sortie du piège de la licence" négocié avec les organisations représentatives de la profession
- La suppression du tarif d'approche
- Un plan de "démocratisation du numérique pour les taxis" et d'équipement en terminaux de paiement par cartes bleues.
- Un numérus clausus sur les VTC.
Philippe Dervaux