(écrit le 29 01 2010)
On pourrait croire que défendre les libertés publiques est un combat ancien, que l'essentiel est acquis. Pourtant elles sont aujourd'hui plus que jamais menacées. Plusieurs raisons expliquent cela:
Elles n'ont rien de naturel malgrès les apparences. Elles sont étroitement liées à la vigueur et à l'authenticité de la démocratie. Elles n'existent que dans ce système, or de nombreuses menaces planent sur notre démocratie:
Il y a le risque que fait courrir la crise des finances publiques commme une véritable épée de Damocles qui plane au-dessus de notre société. Comment réagira l'opinion en cas de crise grave? Les forces de la droite dure et de la droite extrême ne vont-elles pas alors s'allier sous prétexte de mettre fin au désordre engendré par des troubles sociaux prévisibles?
Les moyens techniques, informatiques, électroniques, et la miniaturisation notamment des puces électroniques ont tellement progressés qu'ils permettent de collecter une infinité d'informations et de contrôler toujours plus précisemment nos moindre faits et gestes. Combinés à la tentation du toujours plus répressif, à la commercialisation toujours plus grande de tous les aspects de la vie, cela constitue un cocktail potentiellement extrêmement dangereux pour les libertés.
Nos mentalités ont changées. A l'esprit de tolérance des années 70 et 80 a suivi un état d'esprit renfermé sur son petit confort, pudibond voire même puritain, maladivement sécuritaire, ne voulant prendre aucun risque. Or la liberté est toujours un risque, une ouverture d'esprit, et une joie de vivre.
La superficialité du débat public, la mise en scène médiatique des faits divers, le désintérêt envers la politique faussement justifié par le discrédit de la classe politique avec ses pratiques contestables et son impuissance de plus en plus grande, l'affaiblissement des repères et de la conscience politique, l'emprise de la communication, le développement du lobbying, le non respect des principes de base de la démocratie que sont la séparation des pouvoirs et l'existence de contre pouvoirs forts,... nous amènent insidieusement à accepter petit à petit la remise en cause de nos libertés publiques.
La partialité des télés dans le traitement des questions de société est affligeant. Systématiquement, un fait divers montrant un cas extrême est monté en épingle. Une association répressive intervient alors pour plaider pour une nouvelle loi répressive. Des citoyens lambda favorables à cette nouvelle loi ou mal informés sont utilisés pour la cautionner. Jamais des citoyens opposés ne sont interrogés. Jamais une étude n'est faîte sur les personnes lésées par cette loi. Les souffrances au quotidien de millions de personnes sont méthodiquement tues. Un véritable déni de démocratie est à chaque fois renouvelé. Il est donc indispensable d'exiger une étude d'impact sur chaque nouvelle loi répressive, et de faire un inventaire général de toutes celles en vigueur pour étudier la possibilité d'humaniser notre société en supprimant bon nombre de ces lois. Compte tenu des multiples mesures d'amnisties accordées aux puissants de notre société, et au refus de la moindre amnistie pour les autres, le MoDem devrait aller encore plus loin en proposant d'amnistier une partie des "victimes" de ces lois répressives durant le mandat de Nicolas Sarkozy.
Le rôle du Modem est d'être à la fois le défenseur acharné de l'authenticité de la démocratie, ce que François Bayrou fait très bien dans son livre abus de pouvoir, et d'être un mouvement politique libéral dans le sens culturel et des moeurs du terme, ce qu'il n'assume pas assez. Le Modem doit promouvoir sans complexe une société tolérante, libre, diverse, non autoritariste. Car les libertés publiques sont à la fois le fruit de la démocratie et d'un état d'esprit. Elles sont proportionnelles à l'authenticité de la démocratie et à notre degré d'ouverture d'esprit.
PS: l'actualité illustre malheureusement la menace que les nouvelles technologies associées à une politique sécuritaire font peser sur nos libertés fondamentales avec "le fichier des honnêtes gens".
Philippe Dervaux